La Société belge des professeurs de mathématiques d’expression française tient son congrès annuel chaque année à la fin du mois d’août. Les conférences et nombreux ateliers, souvent ludiques ou participatifs, sont autant d’occasions de faire le plein de bonnes idées à tester avec ses élèves.
Le mardi 22 août 2023, sous un soleil éclatant, s’ouvre, au collège Saint-Michel d’Etterbeek, commune voisine de Bruxelles, le 48e congrès organisé par la Société belge des professeurs de mathématiques d’expression française (SBPMef). Ouvert en 1905, l’établissement, qui accueille les élèves durant leurs six années d’études secondaires (l’équivalent des cycles 4 et 5 en France), compte parmi ses anciens étudiants l’actuel roi Philippe, l’ingénieur André Waterkeyn (1917–2005), créateur de l’Atomium, ou encore l’astronome et physicien Georges Lemaître (1894–1966), père du Big-Bang. Une fresque murale dans l’un des escaliers expose les portraits de nombreuses célébrités qui ont étudié là.
Le congrès s’ouvre par une conférence précédée de quelques mots de la présidente de la SBPMef, Valérie Henry (voir encadré). Il est prévu, durant ces trois jours, deux conférences encadrant huit plages d’ateliers. Nous avons pu assister à certains d’entre eux.
Un projet en co-intervention Maths/Histoire-géographie autour du développement durable a retenu notre attention par son originalité. Un autre atelier a montré un exemple de détournement d’un jeu de société (ici, Narabi, Lifestyle Boardgames Ltd, 2019) afin d’en faire un jeu collaboratif d’entraînement à la manipulation des fractions. La nouvelle version de ce jeu d’ordonnancement a été jouée puis commentée par les participants. Yves Cuisenaire, le petit-fils de l’inventeur des réglettes du même nom (voir Tangente 130, 2009), est venu présenter des manipulations toujours très actuelles pour l’apprentissage du nombre. Par ailleurs, un exposé sur les différentes techniques historiques de multiplication et de division a rencontré un grand succès. De fait, les méthodes actuellement enseignées ne sont pas forcément les plus simples à mettre en œuvre… Mais l’intervention a fait prendre conscience qu’il en a existé également de bien plus élaborées.
Valérie Henry,
un engagement pour l’enseignement
Présidente de la SBPMef depuis onze ans, Valéry Henry est enseignante à l’université de Namur et à l’université de Liège. Elle est formatrice d’enseignants du secondaire supérieur (lycée) et a soutenu en 2004 une thèse en didactique des disciplines scientifiques sur le thème de l’enseignement de l’analyse non standard à de futurs économistes. Chercheure en didactique des mathématiques, elle encadre plusieurs thèses de doctorat à l’UNamur. Très impliquée dans les questions de diffusion des mathématiques, elle participe régulièrement à l’élaboration des référentiels et des programmes. Valérie Henry est également rédactrice en chef de la revue Losanges et directrice de recherche au CREM.
Recherche sur l’enseignement des maths
Le Centre de recherche sur l’enseignement des mathématiques (CREM) est une association belge à but non lucratif fondée en 1992 à l’initiative de mathématiciens issus des universités, de l’enseignement secondaire et de l’inspection. L’objectif est de produire des ressources utilisables en classe par les professeurs. Les productions du CREM sont mises au point, testées, puis diffusées librement. L’association propose également des formations et gère une bibliothèque pédagogique dans ses locaux. Toutes les productions (séquences d’apprentissage, brochure, logiciels…) sont à disposition sur le site du CREM (crem.be). L’association fonctionne avec trois postes temporaires d’informaticien et de chercheur, financés par la Fédération Wallonie-Bruxelles et grâce au soutien de bénévoles issus du monde de l’enseignement. Plusieurs membres de la SBPMef s’investissent dans l’administration et la direction des recherches du CREM.
Le congrès est une occasion pour le CREM de présenter sa dernière création : la version mobile du logiciel Apprenti Géomètre, conçu pour travailler les notions de grandeurs à partir de formes géométriques que l’on peut déplacer, dupliquer, découper, assembler… Les participants ont été invités à réaliser sur des tablettes, comme les élèves, les premières manipulations qui leurs permettront de se familiariser avec les commandes du logiciel. Ce dernier est téléchargeable ou utilisable directement en ligne sur ag.crem.be.
Les enseignants belges qui voudraient participer à des recherches autour de nouvelles pratiques pédagogiques ont la possibilité d’intégrer un des groupes de travail du GEM, Groupe d’enseignement des mathématiques (wp.gem-math.be). Créé en 1977 par le mathématicien Nicolas Rouche (1825–2008), son fonctionnement se rapproche de celui d’un IREM français. Il échange d’ailleurs régulièrement avec l’IREM de Lille (Nord).
Une revue sur l’enseignement
La revue Losanges (www.sbpm.be/losanges), publiée par la SBPMef et disponible sur abonnement, est à destination des enseignants de mathématiques du primaire au supérieur. Quatre rubriques la composent : « Réflexions » propose des articles sur les pratiques pédagogiques, des activités en classes, ainsi que des sujets mathématiques susceptibles d’intéresser des enseignants ; « Technologies » présente des possibilités d’usage des outils numériques ; « Jeux et concours » est une rubrique de problèmes et « Regard sur » met l’accent sur une ressource (livre, film, site…). Quatre numéros sont publiés chaque année. Les articles sont accessibles librement en version numérique au bout de deux ans.
On peut également accéder, via le site de la SBPMef (www.sbpm.be), à la liste des anciennes publications de l’association. Certaines sont en accès libre.
Dans les attributions de la SBPMef figure également la gestion des olympiades et autres rallyes. Comme en France, des Olympiades nationales (les Olympiades mathématiques belges ; omb.sbpm.be) sont organisées chaque année. Elles sont ouvertes à tous les élèves francophones belges du secondaire ainsi qu’aux luxembourgeois. Pour le primaire, la section belge du Rallye mathématique transalpin (rmt-belgique.be) propose une compétition qui voit s’affronter des classes (du CE2 à la quatrième, en équivalent français) sur cinquante minutes.
Au niveau international, la Belgique est représentée aux Olympiades internationales de mathématiques (www.imo-official.org ; six participants par pays) et aux European Girls’ MathematicalOlympiad (EGMO ; www.egmo.org), qui se disputent par équipes de quatre compétitrices.
Le congrès de la SBPMef touche à sa fin. En marge de l’évènement étaient également proposées la visite de la Maison Cauchie, chef-d’œuvre de l’Art nouveau, entièrement restaurée, située non loin du collège Saint-Michel, ainsi que la participation au traditionnel banquet.
Pourquoi assister à un congrès ? Outre l’intérêt intellectuel et professionnel, c’est l’occasion de belles rencontres, de stimulation créative et de faire le plein de bonnes idées à tester avec ses élèves. De nombreux enseignants français (pas forcément frontaliers) profitent de cette opportunité qui leur est donnée chaque année de découvrir d’autres pratiques tout en savourant les derniers jours de vacances dans un environnement dépaysant. Une manière agréable de préparer la rentrée…
Le prochain congrès aura lieu à Namur. Le rendez-vous est pris !
Le système scolaire en Belgique
Le système scolaire de la partie francophone belge repose sur trois réseaux d’enseignement : le réseau de la Fédération Wallonie-Bruxelles appelé parfois officiel subventionné, le réseau des villes, communes et provinces, que l’on appelle l’officiel non subventionné, et le réseau libre, qui regroupe tout ce qui est non officiel : des écoles confessionnelles comme les écoles catholiques, mais aussi des écoles non confessionnelles comme les écoles à pédagogies actives Freinet, Decroly et autres.
En primaire, il y a 6 niveaux, de la première (qui correspond au CP en France) à la sixième (qui correspond à la sixième en France). L’équivalent du collège est, en Belgique, le secondaire inférieur, de la première (qui correspond à la cinquième en France) à la troisième (appelée aussi troisième en France). L’équivalent du lycée est le secondaire supérieur, de la quatrième (qui correspond à la seconde en France) à la sixième (qui correspond à la terminale).
Joëlle Lamon